1. Qu’est-ce que c’est le pho treo ?
Au cœur de Hanoï se trouve un restaurant de pho particulier, très apprécié par les habitants locaux. Il s'agit du restaurant de « pho treo », littéralement traduit à « pho suspendu » situé au 14 rue Bao Khanh, Hoan Kiem, Hanoi, tenu par la famille de Mme Nguyên Thi Cat Lê (née en 1979). Le concept du pho treo est simple : Les clients du restaurant peuvent payer en avance pour un ou plusieurs bols de pho supplémentaires (ce qu’on appelle « suspendre un bol de pho »), pour que les personnes en situation précaire puissent venir en manger gratuitement plus tard.
Afin de maintenir une quantité stable de pho pour les personnes dans le besoin, le restaurant suspend lui-même 30 bols chaque jour. Les clients peuvent contribuer volontairement à partir du 31e bol. Le nombre total de bols suspendus pour la journée sont clairement affichés sur un tableau devant le restaurant. Il peut varier d'un jour à l'autre, allant de un ou deux bols à jusqu'à 20 bols. Les bols de pho suspendu mais non utilisés de la veille sont reportés au jour suivant.
En ce qui concerne les personnes éligibles pour manger du pho suspendu, Mme Le explique : « Tout le monde peut venir manger du pho treo, mais nous privilégions les personnes âgées, les enfants, les personnes handicapées et les étudiants. Toutefois, même les jeunes en bonne santé peuvent en bénéficier, car peut-être ils veulent travailler mais ne trouvent pas encore d'emploi. Un bol de pho peut les aider grandement. »
En général, les bols de pho treo sont plus grands que ceux ordinaires au restaurant de Mme Lê, car, selon elle, les travailleurs ont besoin de plus d'énergie. Elle ajoute davantage de nouilles et de viande afin d’assurer une alimentation nutritive pour les plus démunis. De plus, beaucoup de gens viennent manger vers midi car ils préfèrent combiner le petit-déjeuner et le déjeuner en un seul repas. « Je leur conseille aussi de venir manger quand ils ont faim, mais par modestie, ils ne viennent que pour un seul repas. » Peu importe le montant des contributions du jour, les bols de pho pour les défavorisés sont toujours préparés avec soin et qualité.
2. D’où cette idée de pho treo ?
Mme Lê a un restaurant qui sert le Banh Cuôn (crêpe vietnamienne à la vapeur). Elle explique que lors de la pandémie de Covid-19, elle a par hasard regardé une émission sur le concept de café suspendu et de pommes suspendues en Italie, et plus récemment, sur le modèle de riz suspendu à Hô Chi Minh-Ville. Inspirée par cette initiative pleine de sens, elle a discuté d'ajouter du pho treo à son restaurant avec sa famille qui l’a toute pleinement soutenue. Mais la situation à l’époque ne permettait pas encore de la mettre en œuvre. Maintenant, la vie reprend, elle décide de lancer son projet.
Le modèle a été mis en place dans le restaurant depuis juillet 2024. Le panneau expliquant le concept du pho treo a été conçu et imprimé par son fils. « Quand j'ai partagé cette idée avec mon mari, mon fils et mes proches, tout le monde a approuvé et soutenu. Le modèle de pho treo est né grâce à la contribution de nombreuses personnes, ce n’est pas seulement moi qui l’ai réalisé. » a déclaré Mme Lê en souriant.
Bien que le concept de pho treo soit encore nouveau, les habitants ici ne sont pas étrangers aux actions caritatives de Mme Lê. Depuis plus de 10 ans, elle distribue régulièrement des repas gratuits, comme du riz, du pho et des soupes, dans les hôpitaux et aux personnes dans le besoin et effectue de nombreuses missions de bénévolat, qu'elles soient proches ou éloignées.
Cependant, peu de gens savent qu'elle a traversé des moments de difficulté et de privation dans le passé. Il y a 15 ans, lors d’un séjour à l’hôpital, elle a été témoin de nombreuses situations tragiques : « Ils manquaient de tout, des frais médicaux jusqu’aux coûts de subsistance. La première fois que j’ai reçu un repas gratuit à l’hôpital, j’ai compris à quel point cela comptait pour les patients et leurs proches. À ce moment-là, j’ai pris le repas mais je ne l’ai pas mangé, je l’ai donné à quelqu’un qui en avait plus besoin que moi. Après ma sortie de l’hôpital, je me suis promis de cuisiner des repas gratuits pour les malades et les personnes en difficulté » , a confié Mme Lê.
3. Une grande aide pour les démunis
Mme. Pham Thi Ngà (67 ans), avec ses épaules fatiguées par le poids de l'âge et les préoccupations quotidiennes, pousse lentement une vieille charrette à travers les rues de Hanoï. Sur la charrette se trouve son petit-fils, les yeux écarquillés, regardant curieusement la ville. En passant devant le restaurant de pho au numéro 14 rue Bao Khanh, elle est accueillie chaleureusement par le personnel. Avant de connaître cette adresse, Ngà se contentait de manger du riz froid, et certains jours, elle devait garder le ventre vide. En parlant de sa situation, elle est émue : « Je m'occupe actuellement de deux jeunes petits-enfants. Leurs parents sont partis. Tous les jours, je laisse mes petits-enfants à la maternelle, puis je pars ramasser des bouteilles en plastique et les vends pour gagner de quoi vivre ».
Le soleil étant déjà haut dans le ciel, d'autres clients viennent déguster le pho treo. Une femme portant des ferrailles sur le dos entre lentement dans le restaurant, tout en demandant s'il y avait bien du pho treo. Le personnel lui répond avec des sourires et une phrase réconfortante : « Venez manger du pho et boire de l'eau, tout est entièrement gratuit ».
Mme. Nguyen Thi Ngoat (68 ans) essuie la sueur avec un chiffon en attendant son bol de pho. Elle explique qu'elle travaille comme agente de propreté urbaine au jardin Hàng Trông et qu'elle doit parcourir plus de 10 km à vélo chaque jour depuis la périphérie pour venir travailler en ville. Son mari est malade, et leur situation financière est difficile, ce qui la pousse à continuer de travailler. Elle avoue qu'avant, elle n'aurait jamais pensé acheter un bol de pho pour elle-même. En évoquant sa première expérience avec le pho treo, elle raconte : « Des collègues m'ont parlé d'un restaurant où l'on offrait du pho gratuitement aux travailleurs en difficulté. La première fois, je n’osais pas entrer, ne comprenant pas bien comment cela fonctionnait, et je me demandais s'ils allaient vraiment me faire payer ou non. Ce n'est qu'après que la propriétaire m'a tout expliqué en détail que j'ai pu m'installer tranquillement. » Elle n’y vient pas trop souvent, mais chaque fois, le bol rempli de viande lui permet de garder l'estomac plein pendant toute la journée. Lorsqu’il y a plusieurs portions disponibles, elle en demande quelques-unes à emporter pour ses petits-enfants et son mari.
M. Trân Anh Dung gagne sa vie en ramassant des bouteilles en plastique autour du lac Hoan Kiem, mais ce travail ne lui rapporte que 20 000 à 30 000 dongs par jour. Avec un tel revenu, il n’avait jamais imaginé pouvoir s’asseoir dans un restaurant et manger du pho. « Il y a environ deux semaines, alors que je fouillais dans les poubelles à proximité, un agent de sécurité m'a pris par la main et m'a conduit au restaurant pour manger du pho treo. À ce moment-là, je ne savais pas ce que c'était, et comme je n'avais pas d'argent, j'étais très effrayé et anxieux. » Ce n'est qu'après avoir reçu des explications sur le concept du pho treo, où les clients ne paient rien, que Dung s'est senti à l'aise. Il raconte avec joie « Les portions sont grandes, le pho est délicieux, et la propriétaire est très gentille. Aujourd'hui, elle m’a même donné 100 000 dongs pour acheter des médicaments en cas de maladie. »
Mme. Nguyên Thi Hiên, une sans-abri, déclare : « Ce bol de pho a une grande signification pour nous. Nous n’aurions jamais pu dépenser 50 000 dongs pour un bol de pho. C'est une grosse somme pour moi. Ma santé s'améliore, alors qu'avant j'étais maigre et faible. »
4. Écho favorable de la communauté
Les clients suspendent des bols de pho selon l'appel du cœur et les moyens de chacun, et ils peuvent accrocher eux-mêmes le numéro de bols sur le tableau du restaurant. En entendant par hasard parler du concept de pho treo, Phuong et sa fille se sont rendues au restaurant le midi. « Je trouve que c’est un modèle à la fois beau et significatif, mettant en avant la tradition vietnamienne de solidarité, d'entraide, et de compassion. Ma fille a décidé de suspendre 4 bols de pho dans l’espoir de pouvoir aider, ne serait-ce qu’un peu, les personnes en difficulté » , a-t-elle déclaré.
Nguyên Quang Linh, un client régulier du restaurant, a ajouté : « Je mange souvent ici. Quand j'ai vu le tableau indiquant le pho treo, j'étais curieux, alors j’ai demandé. Depuis ce jour-là, après chaque repas, je fais toujours suspendre quelques portions de pho. Aujourd'hui, j'en ai suspendu deux. » Le groupe de Lê Hiêu, à la table voisine, ont aussi décidé de suspendre chacun une portion.
Nguyên Thi Thu Hà a exprimé : « J'espère que ce modèle sera répandu dans de nombreuses autres villes et provinces, pas seulement pour le pho, mais aussi pour le riz, les vermicelles ou les banh mi afin d’aider encore plus de personnes dans le besoin. C’est un petit geste, mais cela permet à ceux qui sont en difficulté d’avoir l’énergie pour travailler. »
Samson, un voyageur canadien, a témoigné : « J’ai également apporté ma contribution car c’est une idée formidable qui mérite d’être diffusée. J’espère qu’elle sera mise en place au Canada pour aider ceux qui sont en difficulté, car un bon repas pour la journée peut vraiment faire la différence pour eux. »
« Je suis très heureuse de voir tant de personnes participer à mon initiative. » a dit Mme. Cat Lê « Ce n'est pas seulement une manière d'aider les personnes vulnérables, mais aussi une opportunité pour chacun de répandre la solidarité et la bienveillance ». Elle espère que son initiative se répandra dans d'autres restaurants, afin que plus de démunis puissent en profiter.
Le nombre de bols de pho treo augmente chaque jour. De plus en plus de personnes fragiles pourront bénéficier de repas décents …
Sources : Vietnam Télévision
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